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Une entrevue au Japon – Hiroshi Nishikawa

À l’occasion de son voyage au Japon en juillet 2019, l’équipe d’inno³ a rencontré Hiroshi Nishikawa, responsable des partenariats et du programme Orange Fab Asia de Tokyo. Le but de ce programme est d’aider les start-ups à développer leur activité et à développer des produits et services dont Orange et ses clients pourront bénéficier.

Présentation du Orange Fab Asia et de ses enjeux

Travaillant chez Orange depuis bientôt 10 ans, Hiroshi Nishikawa est actuellement en charge du Orange Fab Asia de Tokyo, un programme d’accélération de start-ups (fablab) qui comprend plusieurs bureaux dispersés au Japon. Ce programme a été expérimenté pour la première fois aux États-Unis avant d’être lancé au Japon, puis d’être étendu en Corée et Taïwan en 2014.

Le Orange Fab Asia propose aux start-ups japonaises (ou étrangères sur le sol nippon) un programme en 3 mois pour les accompagner dans leur croissance et faire naître des collaborations avec Orange, en leur partageant notamment leur liste de partenaires (AXA, Air Liquide, LVMH, etc.) et en les aidant à promouvoir leurs services et produits à une plus grande audience. De plus, ces start-ups peuvent également être présentées au cours d’évènements internationaux (par exemple à Vivatech à Paris en 2018), leur permettant ainsi d’étendre leurs activités à différents marchés.

Les programmes d’accélération de start-ups deviennent monnaie courante au Japon, il en existe plus de 150 et chaque grande entreprise commence à développer le sien. Ces derniers entretiennent des liens et échangent régulièrement. Il est d’ailleurs commun qu’une même start-up passe par plusieurs accélérateurs. Le gouvernement japonais souhaite, à ce titre, reproduire l’environnement de la FrenchTech sur son propre sol.

Une collaboration portée sous les signes de l’open innovation

Les start-ups participant à ce programme peuvent venir de tout secteur bien que l’on retrouve une forte représentation des domaines du logiciel, de l’intelligence artificielle, et de l’IoT (Internet of Things). Le secteur de la robotique en revanche y est beaucoup moins représenté, tout comme les mouvements de l’open source et de l’open data encore très peu reconnus au Japon. Pour autant, les modèles ouverts y suscitent de plus en plus d’intérêt.

La politique de l’accélérateur est, quant à elle, davantage portée sur l’open innovation, comme peut le démontrer sa dynamique collaborative. En effet, le Orange Fab Asia collabore régulièrement, en Asie, avec des organisations concurrentes telles que Bouygues, Free, etc., contrairement à la réalité du marché Français. Cette facilité de collaboration vient notamment du fait que le sentiment de compétition entre ces différentes organisations françaises y est moins présent sur le continent asiatique. L’accélérateur y a ainsi développé une forte alliance, notamment avec la Chine et la Corée, collaboration qui a donné naissance à l’’“Asian Alliance” (alliance asiatique). Il existe d’ailleurs des programmes similaires à celui de l’Orange Fab Asia en Corée et à Taïwan. La société est également présente en Chine mais avec un autre programme : le Orange Fab China Tour.

Cette alliance avec la Chine et la Corée détonne avec ce que nous tirons des autres interviews réalisés lors de notre voyage auprès d’organisations japonaises. Cette différence s’explique assez facilement par le fait qu’ils ne réalisent pas de chiffre d’affaire sur ces marchés et œuvrent pour un même objectif : le développement des start-ups, il n’y a donc pas de compétition ressentie.

Cela peut ainsi se traduire en une démarche d’open innovation, modèle qui prône des valeurs de partage et de coopération. La collaboration entre sociétés est d’ailleurs relativement courante sur le sol nippon. Malgré tout, il n’existe pas encore d’écosystème permettant aux organisations de travailler et d’innover ensemble au Japon, bien que ce soit un axe en cours d’amélioration.

La diversité : un enjeu majeur pour le futur

Hiroshi Nishikawa, notre interviewé, considère que pour innover la diversité est primordiale, mais peu de monde semble s’en apercevoir pour le moment. C’est d’ailleurs l’un des grands défis du Japon, autant en termes de genres, que de nationalités, etc. Pour instaurer une plus grande diversité, il serait alors nécessaire de recenser :

  • Plus de femmes à des postes importants ;
  • Plus de Japonais qui parlent anglais. Or pour le moment les Japonais sont uniquement tournés vers leurs marchés intérieurs et très peu vers l’international, ce qui représente une véritable barrière à la collaboration ;
  • Plus d’étrangers au sein des entreprises nippones. Ces derniers pourraient en effet apporter une nouvelle vision, de nouvelles perspectives, etc.

Par ailleurs, le Tokyo metropolitan government (le gouvernement tokyoïte) a lui aussi lancé un programme destiné au développement des start-ups. Ce programme étant seulement disponible en anglais, une seule une start-up étrangère y a répondu ce qui illustre que la barrière de la langue y est encore bien présente. En effet, de nombreuses entreprises internationales souhaitent régulièrement développer leurs activités sur le sol nippon mais elles se retrouvent très rapidement freinées par le manque d’ouverture. Autrement dit, de nos jours, parler japonais reste une variable essentielle pour lancer des activités au Japon.

Cette ouverture sur le monde extérieur dans la grande majorité du pays se ressent également dans l’enseignement supérieur. Le nombre d’étudiants japonais effectuant un ou plusieurs semestres à l’étranger dans le cadre de leur cursus était beaucoup plus courant il y a quelques années. Les chiffres sont aujourd’hui en forte décroissance, en raison du manque d’ouverture des entreprises japonaises vers le monde extérieur et donc de la non nécessité de parler anglais pour trouver du travail au Japon.

Le Japon se retrouve face à de grands enjeux pour son développement futur, on commence cependant à constater progressivement une évolution des mentalités vers une ouverture croissante et une augmentation des entreprises étrangères intégrant le marché nippon avec succès.


En juillet 2019, l’équipe d’inno³ s’est rendue au Japon afin de rencontrer les acteurs locaux issus des milieux du numérique, de l’open source, de l’open data, etc. et d’échanger sur leurs pratiques et projets d’innovation ouvertes. En effet, la scène japonaise fascine bon nombre d’occidentaux pour son marché numérique et technologique évolutif et innovant, pour sa singularité et son approche ancestrale perpétuée dans de nombreux domaines. On pourrait alors caractériser l’île nippone de curiosité stimulante.

Mais que connaissons-nous vraiment de l’archipel, de ses acteurs et de leurs projets, en particulier en matière d’innovation ouverte ? Un trop grand nombre de projets sont encore méconnus en France bien qu’il existe certainement de nombreuses possibilités de mutualisation et d’apprentissage. Autrement dit, que pouvons-nous apprendre d’eux et que pouvons-nous leur apporter afin de contribuer ensemble à l’évolution du marché ? Inno³ s’est alors rendu sur place afin de rencontrer l’écosystème japonais.

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